2009-11-17

la Philosophie dans le Fumoir ou "A quoi ça sert de fumer?"

J'avais trop faim, donc j'ai craqué, je suis allé me bouffer un pho. Un Pho c'est une soupe vietnamienne (qui d'ailleurs s'écrit phở, mais ça m'emmerde un peu d'avoir à copier/coller à chaque fois le "ở" à la fin), à base de pâte de riz et de bouillon de bœuf. Le resto ressemble plus à une cantine, une sorte de boui-boui qui fait que ça doit être "bon comme là-bas" (l'accent pied noir façon Marthe Villalonga en moins, vous l'aurez deviné). La première fois que j'y suis allé, je ne savais pas trop quoi faire, car tu poses tes fesses sur la chaise ou un tabouret si tu as pas de bol (et je déteste les tabourets) et tu as sur la table une sorte d'assiette ovale composée de quartiers de citron, de pousses de soja et de quelques plantes. Il me semble avoir deviné de la sauge, de la coriandre... et c'est tout. J'ai cru bon une fois demander ce que c'était, mais on m'a répondu en vietnamien... j'étais pas plus avancé. Donc la première fois, ne sachant pas comment m'y prendre, je regardais autour de moi afin d'imiter les autres clients. Je n'ai eu ce sentiment qu'à un autre moment dans ma vie, la première et seule fois où j'ai pris l'avion en business class, le but du jeu étant de ne pas passer pour le premier péquenot venu ayant gagné son voyage à la Roue de la Fortune... je m'en souviens encore, je regardais les autres passagers enlever leurs chaussures et mettre les petits chaussons qui étaient mis à disposition dans les trousses de toilettes... ah, c'était donc des chaussons et non des range-couverts... Revenons-en au pho. En observant, tel un vieux singe, mes congénères, j'ai enfin pu maitriser l'art de la préparation et de la dégustation de ce plat national vietnamien, qui, je l'ai appris par la suite, fait office de petit-dej', de déjeuner et de dîner. C'est simple, on prend ce qu'il y a dans cette assiette et on le met dans son bouillon, avec des oignons, du citron et du piment.
Mais pourquoi je vous parle de ça? Non, je n'ai pas de part dans ces restos... Car du côté de Tolbiac, dans le 13ème à Paris, là ou se trouve ces boui-bouis, se situe également une civette que j'affectionne: La Bouffarde.... et non, je n'ai pas non plus de part dans cette civette. J'associe donc souvent un repas là-bas avec un détour par cette civette.
Le tenancier, Manu, un grand gaillard basque est un vrai passionné, le type qui ne te fait pas de leçon sur le cigare, mais qui va essayé de te transmettre sa curiosité autour du produit. Sa boutique est sans doute moins connu que les autres grandes civettes parisiennes, et c'est sans doute aussi pour ça que j'en parle, mais il a chez lui des petites perles... Un Arturo Fuente Hemingway Gran Reserva, oui, c'est chez lui, un Padron 1964 Diplomaticos, encore chez lui, etc, etc. ATTENTION, il ne sort pas ces bijoux au premier trou du cul qui vient. Le mec, c'est un sentimental, faut parler avec lui, discuter, échanger, c'est tout. Ne pense pas débarquer chez lui en lui disant "Eh, j'ai lu que vous aviez des Punch Double Co non bagués, je peux en avoir?"... Le cigare, c'est aussi pour rencontrer ce genre de gars, pas très connus, mais qui font chaud au coeur... Car au fond, fumer en soit, ça ne sert à rien...
Bah oui... quel est l'intérêt de fumer? Aucun, et c'est ça que j'adore. On n'est dans le domaine absolu de l'inutile, du futile. Autant boire et manger, découle de besoins naturels, comme faire l'amour d'ailleurs. Je bois à la base pour ne pas me déshydrater, puis découle les plaisirs de la boisson, de même pour manger, idem pour le sexe. Mais fumer, c'est totalement diffèrent! Pire (ou mieux) encore, c'est voir littéralement son pognon partir en fumée (et c'est même pas une image, ça part vraiment en fumée!), et même si on te l'offre, ça n'en reste pas moins l'argent d'un autre qui part en fumée, j'avoue que c'est malgré tout plus agréable dans ce dernier cas. Si on suppose même que tu es à Cuba, que tu es en face d'un torcedor (celui qui roule le cigare) et qu'il te le donne directement, comme ça, à fumer, tu fais partir son travail aussi en fumée... c'est beau? non? Vous n'êtes pas sensible à cette poésie? Bon... tant pis. Tout ça pour dire que le cigare est aussi une mise en distance par rapport au monde, à l'aspect purement matériel des choses. On relativise l'argent, le travail, car au fond, ça part en fumée, il n'en restera rien d'autre que quelques cendres grises... et c'est tout. Le cigare nous rappelle d'en revenir à l'essentiel... "Tu es poussière et tu redeviendras poussière".
Les quelques amis à qui j'ai exposé cette théorie philosophique autour du cigare m'ont tous regardé avec de grands yeux disant "Il nous raconte quoi l'autre avec son "tout part en fumée" et "l'argent est dans la cendre", etc".
- Nico, ça va bien? Le cigare, moi, je le fume juste car c'est bon...
- Ok les mecs, je range toutes mes théories à la con dans un placard, j'ai compris, pas la peine de me faire un dessin...
Sur ces paroles, je m'allume un cigare, sans vouloir philosopher et chercher à faire réfléchir cette poignée de connards... Passe moi le coupe cigare et une allumette...
...
... euh...
... C'est vrai qu'il est bon ce cigare...
... Juste très bon...



3 commentaires:

  1. bravo, en effet Manu a de vrai perles, j'attend le moment pour fumé cet énorme arturo fuente grand reserva, il est bien au chaud dans ma cave à non cubain ... habitant le XIIIème je suis un amateur de pho et de bouffarde aussi, je te conseille Paris vietnam rue de choisy, leur poisson frit est super ... comme le reste d'ailleurs....
    Quand à tes théories fumeuses .... ben c'est bon de voir son patrimoine partir en fumée, pas trop non plus, mais ça a un côté super-détachant qui fait du bien ....

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  2. theories fumeuses... c'est le terme exact!
    Pour le poisson frit, faudra qu'on se fasse ça alors comme je ne suis pas très loin.

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